Publié en mai 2011
Dernière modification en septembre 2024
Le professionnalisme et les valeurs sont des notions qui évoluent au fil du temps. Quelles sont les valeurs de l’ingénieur à l'heure actuelle? Comment celui-ci doit-il envisager l’avenir de sa profession? Dans la société contemporaine, à quoi sert un ordre professionnel? Voici des réponses à ces questions, et plus encore. Que signifie être un professionnel?
Être membre d’un ordre professionnel signifie qu' il faut avoir reçu une longue formation spécialisée. Il faut aussi accepter d’exercer sa profession dans le respect d’un code de déontologie et de règlements, quitte à risquer des mesures disciplinaires dans le cas de comportements jugés hors normes. Cela signifie également de servir prioritairement l’intérêt du public avant le sien. Par contre, les ordres professionnels et leurs membres bénéficient de certains privilèges :
Ces nombreuses prérogatives assoient un important pouvoir social. Il n’y a pas si longtemps, les membres des professions reconnues constituaient une classe dominante, l’élite de la société moderne. C’est peut-être en partie pour cela que plusieurs associations professionnelles demandent à l’Office des professions d’être reconnues comme ordres professionnels. Les contraintes sont-elles un prix trop élevé à payer en contrepartie des avantages? Sont-elles nécessaires? Si oui, pourquoi le sont-elles? Ce qui distingue un professionnelQu’est-ce qui fait, par exemple, qu’un ingénieur soit un professionnel et qu’un mécanicien ne le soit pas? Au sens de la loi, un professionnel, c’est d’abord une personne qui possède un savoir très spécialisé, d’un niveau de complexité élevé. Pour cette raison, ses actes ne peuvent être évalués que par des pairs. Le client est rarement en mesure de juger de la qualité des actes professionnels. Si le service professionnel qu’il a reçu n’est pas à la hauteur de ce à quoi il a droit, non seulement il ne le saura pas toujours, mais il n’est pas certain qu’il sera en mesure, le cas échéant, de demander réparation pour les torts qu’il aurait pu subir. Autrement dit, parce qu’il ne possède pas lui-même le savoir spécialisé du professionnel — raison pour laquelle il le consulte — il se retrouve vulnérable devant le professionnel. De plus, la relation professionnelle, c’est-à-dire la relation entre le professionnel et le client, se caractérise par sa dimension personnelle. Le client est le plus souvent amené à faire part au professionnel de renseignements confidentiels. Un professionnel qui verrait avant tout à son intérêt pourrait les utiliser à son avantage. risque de préjudice lié à la nature des activités professionnelles et à la relation au client nécessite de protéger la relation professionnelle. À cette fin, l’article 23 du Code des professions stipule que la fonction première des ordres professionnels est la protection du public. L’article 87 leur fait obligation de se doter d’un code de déontologie. Le législateur québécois a toutefois choisi de respecter l’autonomie des professions et de mettre en place, pour assurer la protection du public, une structure d’autorégulation qui, par des mécanismes de contrôle et d’inspection relevant des ordres professionnels, garantit la compétence des membres et la qualité des services. Dans cette perspective, les contraintes imposées aux ordres professionnels se présentent davantage comme des garanties offertes au public qui assurent en même temps la crédibilité des professionnels. Confiance et responsabilitéDe manière générale, les gens font confiance aux professionnels. Pour eux, un professionnel est une personne sérieuse qui, à côté de sa compétence plus technique, possède des qualités morales sur lesquelles ils peuvent se fier. Quelqu’un qui a intériorisé les valeurs mises de l’avant par son groupe professionnel. Les gens croient que le professionnel agit, dans sa pratique, de manière responsable envers le client et le public en général, qu’il est soucieux du bien-être du public et que ce souci le distingue des charlatans de tout acabit. Ils savent que les codes de déontologie rappellent à chaque professionnel les valeurs et les qualités morales rattachées à leur profession : intégrité, probité, confidentialité, qualité, etc. Bref, ils considèrent que les ordres professionnels et le système professionnel québécois leur offrent des garanties suffisantes. Pourtant, de nombreux cas de fautes professionnelles, d’abus de pouvoir, d’abus de confiance et de mauvaises pratiques ont entaché la confiance envers les professionnels et engendré un climat de méfiance. La crédibilité, la reconnaissance sociale et le prestige associés au statut de professionnel sont de plus en plus remis en question par un public averti, instruit et vigilant, particulièrement là où les risques environnementaux, physiques et sanitaires sont importants. Dans ce contexte, les gens en viennent à douter des « qualités morales » des professionnels, de leur bonne volonté et de leur motivation à agir d’abord et avant tout dans l’intérêt du public. L’ingénieur : un professionnel comme les autres?L’activité professionnelle de l’ingénieur rappelle celle de tout professionnel : lui aussi exerce un savoir spécialisé et complexe qui l’amène à concevoir des ouvrages, des procédés et des instruments devant répondre à des normes de qualité et de sécurité élevées avant d’être utilisés par le public. En outre, contrairement à l’avocat qui fait face à la seule obligation de moyen, l’ingénieur doit respecter deux obligations, l’une de moyen et l’autre de résultat. Le risque de préjudice est donc au cœur de sa profession. L’ingénieur engage sa responsabilité dans tout ce qu’il conçoit et produit. Mais justement parce que son travail est plus technique qu’humain, l’ingénieur se reconnaît plus difficilement dans le modèle d’une relation professionnelle centrée sur la confiance d’un client en position de vulnérabilité. Et ce, encore moins aujourd’hui qu’il y a trente ans, puisque :
Ainsi, la responsabilité professionnelle de l’ingénieur se trouve également diluée dans celle de l’organisation qui l’emploie. Plusieurs industries sont déjà soumises à d’importants contrôles de qualité. Pourquoi alors, se demandent les ingénieurs, y ajouter l’inspection professionnelle? Pourquoi, à la limite, être membre d’un ordre professionnel? Certains ingénieurs en viennent à perdre de vue l’utilité et les avantages d’être un professionnel. CrédibilitéL’ingénieur est un expert habitué à penser de manière rationnelle. Il a une vision technique de son travail et propose des évaluations techniques. Par ailleurs, il évolue à la fois dans un environnement de développement industriel à haut degré de risque et dans une société où la culture démocratique incite les gens à se prononcer sur les questions de risque. Sans doute, cette « irruption » du public dans l’acte professionnel est-elle dérangeante pour l’ingénieur. Dérangeante, parce qu’elle prend souvent une forme apparemment irrationnelle qui déroute l’expertise technique des professionnels. Le public n’est pas, en effet, forcément le mieux placé et le plus avisé pour porter un jugement sur le plan technique. Dérangeante également parce qu’elle oblige l’ingénieur à concilier vision technique, perception du risque — plutôt qu’évaluation du risque — et valeurs. L’ingénieur n’est pas habitué à penser de cette manière. Cela l’oblige à repenser la manière de se concevoir comme professionnel, à saisir, au-delà de la lettre, l’esprit du professionnalisme. Assurer l’équilibreLe professionnalisme est assuré par les lois et le système judiciaire, mais surtout par la conscience professionnelle des individus et l’autodiscipline qu’ils se donnent comme ordre professionnel. Il représente un point d’équilibre entre les différents conflits de valeurs et d’intérêts présents dans toute pratique professionnelle. Le concept de professionnalisme peut être considéré comme la clé de voûte d’une profession. En effet, l’exercice d’une profession comporte plusieurs éléments qui jouent souvent comme des forces divergentes et contradictoires. Le professionnalisme assure la convergence et l’équilibre de ces forces. En examinant la pratique de l’ingénierie, il est possible de dégager trois principaux éléments, en opposition entre eux.
Exercer la profession d’ingénieur est une façon de gagner sa vie et d'améliorer sa situation. Mais, dans la réalisation de pareils objectifs, on entre forcément en concurrence, sinon en compétition avec d’autres personnes : des confrères, des membres d’autres professions ou d’autres citoyens qui veulent également se tailler une place sur le même marché.
Cette situation, déjà conflictuelle, est elle-même à l’origine d’un autre conflit avec le marché lui-même, plus précisément avec les clients. Ceux-ci voudront profiter au maximum de ce conflit; ils viseront à obtenir les meilleurs services au meilleur prix.
Comment éviter que les activités professionnelles ne nuisent à l’ensemble de la société? Pendant longtemps, par exemple, nous avons vécu sur le postulat que le progrès technologique ne comportait que des avantages pour la société. L’industrialisation était considérée comme une sorte d’absolu dans tout projet de développement. La réalité nous amène aujourd’hui à nuancer cette croyance. La pollution, le risque d’épuiser les ressources non renouvelables et de détruire l’environnement, les maladies industrielles, les stress sociaux causés par la réduction ou la transformation du travail nous incitent à plus de circonspection. Plus concrètement, nous nous demandons à quelles conditions le développement technologique et, donc, la pratique de l’ingénierie peuvent atténuer ou éliminer les répercussions sociales ou environnementales qu’ils engendrent. Trois types de conflitsNous constatons qu’exercer une profession engendre trois types principaux de conflits :
À chacun de ces stades, se trouvent des lois ou des règlements visant à résoudre ces conflits. Dans le cas de plusieurs professions, le législateur québécois définit, par exemple, dans un champ donné de pratique, des actes qui ne peuvent être posés que par les membres d’une profession déterminée. C’est là une façon d’harmoniser concurrence, compétence et sécurité du public. Ainsi, dans le cas de certaines constructions ou de certains traitements médicaux, les expertises et les décisions les plus importantes seront effectuées par une personne dont la compétence est reconnue et qui se portera responsable de ses actes. À un autre niveau, le législateur réglementera la publicité pour éviter que le public ne soit victime de prétentions mensongères. Enfin, plusieurs lois et règlements visent la sécurité de la société, telles les lois sur l’environnement. Les professions se limitent-elles à ces normes? Est-ce que le professionnalisme pourrait se satisfaire de ces règles générales? La tradition professionnelle fournit une réponse éloquente à ces questions. D’hier à aujourd’huiAu XVIIIe siècle avant notre ère, Hammourabi, roi de Babylone, sent le besoin de rassurer la population à l’égard des constructeurs de son temps : il introduit dans son fameux code des clauses obligeant les architectes et les ingénieurs à dédommager leurs clients victimes de négligence ou d’incompétence. Le serment d’Hippocrate visant à rassurer les clients de la médecine remonte probablement au IVe siècle de notre ère. Au XIIIe siècle, Étienne Boileau, administrateur de Paris au temps de saint Louis, rédige Le livre des métiers de Paris. Il y fait le recensement et la révision des 226 métiers pratiqués alors sur son territoire. Nous pouvons y constater que tous ces artisans se sont regroupés en corporations de métiers et que, pour gagner la confiance du public, ils contrôlent la formation des apprentis et la discipline de leurs membres. À cette époque, il n’existe même aucune loi régissant ces métiers : l’autodiscipline des membres et des corporations semble suffire pour assurer la compétence et le respect de la déontologie des pratiques. De nos jours, les gouvernements considèrent que l’autodiscipline ne suffit plus, et les professions sont régies par plusieurs lois et règlements. Pourtant, on prend bien soin habituellement de ne pas soumettre les professions à un contrôle purement extérieur. Les ordres professionnels continuent d’exercer un certain contrôle sur la formation et la discipline de leurs membres. D’où ce pouvoir de contrôle reconnu, par exemple, à l’Ordre des ingénieurs du Québec en matière de formation, d’admission et de discipline. Maintenir l’équilibreL’activité professionnelle, comme toute activité humaine, comporte de multiples avantages pour le professionnel lui-même et pour la société. Au professionnel, elle apporte revenus, statut, accomplissement de soi et satisfaction d’être utile à ses semblables. Cependant, comme toute activité humaine, l’activité professionnelle peut être déviée de ses finalités. Le professionnel peut être négligent et ainsi priver les autres de la compétence qu’il doit assurer. Il peut faire passer le profit avant les services qu’il doit rendre. La science et les savoir-faire dont les professionnels doivent faire profiter la société peuvent se retourner contre elle, comme cela risque d’être le cas avec certaines recherches de la biotechnologie ou encore avec un développement industriel incontrôlé. C’est le rôle du concept de professionnalisme de résister à cette tendance anthropique de toute activité humaine. En se centrant sur la compétence et la responsabilité, il assure non seulement l’équilibre de l’activité professionnelle, mais aussi, pour une large part, l’équilibre de la société elle-même. Valeurs de l’ingénieurD’abord, une question d’honneurL’appartenance à une profession a longtemps été considérée comme un privilège réservé à une élite de la société. Seules quelques personnes pouvaient aspirer à ce statut. Le professionnel avait toutes les raisons de se montrer fier de son titre. En retour, il lui fallait assumer avec dignité ce rôle social important. C’était une question d’honneur. Le mot peut paraître un peu vieillot aujourd’hui, mais il traduit bien un sentiment qui, lui, n’a pas vieilli : le sentiment de mériter de la considération et de garder le droit à sa propre estime. Ce sens de l’honneur était attendu de tous les professionnels, un peu à la façon dont il était attendu des chevaliers du Moyen-Âge qu’ils se montrent dignes de leur titre et de leur rang social. Cela ne veut pas dire que tous les professionnels – comme tous les chevaliers, d’ailleurs – étaient à la hauteur de ces attentes. Il n’y avait pas plus méprisable qu’un chevalier abusant de son pouvoir au détriment des paysans et autres pauvres gens incapables de se défendre à armes égales. En s’abaissant à poser ces gestes disgracieux, celui-ci jetait aussi le discrédit sur les autres chevaliers. Ce faisant, il ne méritait plus d’appartenir à la confrérie des chevaliers. À son origine, le professionnalisme s’est alimenté à ces mêmes valeurs de fierté, de dignité, de mérite et d’honneur. Quoi de plus normal, dans la mesure où, là aussi, il est d’abord question d’un pouvoir susceptible d’être mal utilisé? Les temps ont changéÉvidemment, les temps ont changé à bien des égards, et la réalité de la pratique professionnelle des ingénieurs s’est considérablement transformée. D’une part, les domaines de pratique de l’ingénierie se sont diversifiés au point où nous pourrions parler d’un certain éclatement de la profession. Les formations reçues sont conséquemment de plus en plus différentes, et les fonctions remplies par les ingénieurs sont tout aussi variées : conception, réalisation, exploitation, maintenance, distribution, gestion, développement des affaires, conseil, contrôle, évaluation, etc. Dans ce contexte, certains se demanderont ce qui unit encore la profession. D’autre part, la majorité des ingénieurs sont maintenant salariés, alors que la pratique professionnelle était pensée à l’origine sous le mode de la pratique privée, dans une relation directe avec le client. Pour les ingénieurs salariés, le client est maintenant d’abord l’employeur. Cela touche profondément la relation professionnelle : dans une pratique traditionnelle, le client est en position de vulnérabilité à l’endroit du service offert par l’ingénieur, et la relation professionnelle est alors centrée sur la confiance. Mais lorsque l’employeur est le client, la relation de confiance est encadrée par le contrat de travail. L’autonomie professionnelle de l’ingénieur s’en trouve limitée : il sera bien souvent attendu de lui qu’il agisse en fonction des seuls intérêts de l’organisation qui l’emploie, même s’il peut arriver que cela aille à l’encontre de ses devoirs et obligations envers le public. À qui, alors, devrait aller la loyauté de l’ingénieur? À l’organisation qui l’emploie ou au public dont il doit assurer la sécurité et le bien-être? L’éthique, toujours une valeur de premier planDans ce type de situations, l’ingénieur pourrait être tenté d’adopter des comportements hors normes, c’est-à-dire d’agir à l’encontre de ce que le Code de déontologie exige de lui. Les pressions pour obtenir des contrats et pour produire toujours plus vite ainsi que la croyance selon laquelle il faut satisfaire le client à n’importe quel prix rendent l’ingénieur vulnérable quant au respect des valeurs de sa profession. C’est alors, bien souvent, qu’apparaissent les ententes tacites ou les sceaux de complaisance, qu’un projet est réalisé par un ingénieur même s’il n’a pas toutes les connaissances requises ou encore que l’ingénieur néglige de prendre en considération les conséquences de son travail sur l’environnement, la santé, la sécurité ou la propriété des gens. Valeurs de la professionLes valeurs de fierté, de dignité, de mérite et d’honneur avaient nourri le professionnalisme d’autrefois. Sans être disparues, ces valeurs ne sont plus celles qui traduisent le mieux le professionnalisme contemporain. La profession d’ingénieur se reconnaît aujourd’hui dans quatre grandes valeurs, soit :
La compétence doit être prise au sens large, car elle comporte trois volets : le savoir, le savoir-faire et le savoir-être. Sur le plan du savoir, l'ingénieur compétent a acquis les connaissances scientifiques et techniques pertinentes, ainsi que celles relatives aux règles de l'art applicables à son domaine de pratique. L'ingénieur compétent a également su élargir ses connaissances à des sujets complémentaires importants, comme la gestion de projets ou la gestion de risques, par exemple. Sur le plan du savoir-faire, l'ingénieur compétent est celui qui fait une application rigoureuse des règles de l'art, ce qui se traduit entre autres par le choix et l'utilisation adéquate des bons outils d'analyse et de calculs. Parallèlement, l'ingénieur compétent a développé des habiletés pertinentes à son travail, par exemple en matière de gestion et de communication. Enfin, sur le plan du savoir-être, l'ingénieur compétent est celui qui appuie sa pratique sur des attitudes à la mesure de ses responsabilités. Il fait preuve d'ouverture dans ses relations interpersonnelles, pratique l'écoute et un leadership favorisant l'atteinte des objectifs. Il est capable de remises en question et sait tirer les leçons de ses expériences afin d'améliorer sa pratique. L'intégrité doit être au coeur de ses actions, dans tous les aspects de son travail. Il doit agir avec honnêteté et transparence, préserver la confidentialité des renseignements auxquels il a accès et sauvegarder son indépendance professionnelle. La responsabilité suppose que l'ingénieur n'accepte que les mandats pour lesquels il a les compétences et les moyens requis. Il doit de plus répondre de ses choix et de ses actes, ce qui se traduit dans le fait de se porter personnellement garant de son travail auprès de son client et de la société. La signature de l'ingénieur doit être pour le public un gage de qualité, de fiabilité et de crédibilité. Cette crédibilité est importante à protéger pour la réputation de la profession et le maintien de la relation de confiance avec le public. L'ingénieur est redevable vis-à-vis l'Ordre, ainsi que sur les plans civil, pénal et criminel de ses actions et de ses décisions, même celles qui sont posées en dehors du mandat ou du contrat qu'il a conclu avec son client. L’engagement social de l'ingénieur se manifeste par le fait d'agir en citoyen responsable et d'exercer ses activités professionnelles selon les principes du développement durable. C'est donc dire que ses actions et ses décisions sont guidées par la prise en compte des impacts sociaux, économiques et environnementaux à long terme afin de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins. L'engagement social de l'ingénieur se manifeste aussi par le fait d'exercer un leadership positif auprès de ses confrères, par exemple pour les inciter à respecter les lois et les règlements, la déontologie et les valeurs de la profession. Il peut également partager ses connaissances et son expérience dans son entourage professionnel, ce qui peut se traduire, à l'égard des jeunes ingénieurs, par le fait de s'impliquer dans des activités de mentorat et de parrainage, des contributions importantes à leur développement professionnel. Par ailleurs, par leurs très grandes expertises, dans de multiples domaines, les ingénieurs peuvent mettre leurs compétences au service du débat public autant qu'à la recherche, et ainsi contribuer à éclairer les choix de société à l'égard du présent et de l'avenir. Déontologie et valeursOn fait souvent l’erreur de confondre les valeurs de la profession et la déontologie professionnelle. L’une et l’autre sont différentes, mais elles se complètent. La déontologie est l’ensemble des devoirs et obligations imposés à des professionnels dans l’exercice de leur profession. Ce sont des règles qui ont été édictées dans le but premier d’assurer la protection du public et de baliser les relations du professionnel avec le client ainsi qu’avec sa profession. Les valeurs sont d’une autre nature. Elles motivent quelqu’un à agir dans un sens plutôt que dans un autre. Par exemple, la personne qui valorise l’honnêteté est motivée à ne pas mentir, même lorsque l’occasion d’en tirer un profit se présente. Les valeurs font partie de la personne, elles s’expriment dans ses actes, ses paroles et ses attitudes. Les valeurs guident également la façon qu’a le professionnel de comprendre et de respecter sa déontologie. Si les valeurs de la personne sont éloignées du professionnalisme, cette personne risque de ne pas appliquer correctement la déontologie. On pourra donc obliger quelqu’un à respecter des règles de déontologie sous peine de sanction, et des mécanismes sont prévus à cet effet dans tout ordre professionnel. Toutefois, nul ne peut obliger quelqu’un à s’approprier des valeurs, à faire en sorte qu’elles deviennent comme une seconde nature, car il ne s’agit pas d’obéir à ces valeurs mais d’en partager le sens, de manière à agir en toute circonstance avec professionnalisme. Il n’en allait pas autrement des chevaliers qui partageaient des valeurs de fierté et d’honneur…C’est par le respect des valeurs et de la déontologie que la profession d’ingénieur mérite la confiance du public. Cadre de référence du professionnalismePour les ingénieurs, le professionnalisme comporte plusieurs devoirs fondamentaux auxquels se rattachent quatre grandes valeurs. Afin d'illustrer ces concepts qui doivent guider les actions et les décisions des ingénieurs et qui sont à la base des règles de déontologie, l'Ordre a créé un outil : le Cadre de référence du professionnalisme. L'ingénieur qui comprend l'essence de ces devoirs et qui a intégré les valeurs de la profession dans sa pratique est en mesure d'exercer selon les plus hauts standards du professionnalisme. Cadre de référence du professionnalisme Au cœur du schéma se trouvent les devoirs de l'ingénieur envers le public, ce qui signifie que dans tous les aspects de son travail, l'ingénieur doit :
À ce noyau, s'ajoutent d'autres devoirs fondamentaux :
Ces devoirs fondamentaux se traduisent par le respect des quatre grandes valeurs de la profession auxquelles ils sont liés la compétence, la responsabilité, le sens de l'éthique, l'engagement social. Notez que le Cadre de référence étant une illustration des principaux devoirs et valeurs qui doivent guider l'ingénieur dans l'exercice de ses activités professionnelles, toutes les obligations déontologiques spécifiques prévues au Code des professions et au Code de déontologie des ingénieurs ne s'y trouvent pas nécessairement. Il appartient à chaque ingénieur d'en prendre connaissance, comme il le ferait de toute la réglementation qui encadre l'exercice de sa profession, et de s'y référer au besoin. Types de responsabilitésL’ingénieur est un professionnel qui doit assumer la plénitude de ses responsabilités envers le public, ses employeurs, ses clients, ses confrères, lui-même et sa profession. Il existe plusieurs types de responsabilités, notamment :
Responsabilité professionnelleUn ingénieur a la responsabilité, sur le plan professionnel, de suivre les exigences prescrites à sa profession par le Code des professions, la Loi sur les ingénieurs et les règlements qui s’y rapportent. En cas de manquement à ces règles, il s’expose aux sanctions disciplinaires prévues par ces textes législatifs et réglementaires. Responsabilité civileUn ingénieur est responsable, sur le plan civil, du préjudice qu’il cause à autrui en conséquence des actes, erreurs, négligences et omissions commis dans l’exécution de son travail professionnel, dans la mesure où ceux-ci constituent une faute au sens du droit civil. De même, il peut être tenu responsable, au même titre, du préjudice causé à autrui par une personne agissant sous sa supervision (aussi appelée direction et surveillance immédiates) (candidat à la profession [CPI] ou toute autre personne qui n’est pas membre de l’Ordre). Responsabilité pénaleUn ingénieur est responsable, sur le plan pénal, s’il contrevient à une loi de nature pénale ou criminelle. Le système pénal cherche à promouvoir l’ordre social et à prohiber l’accomplissement d’infractions criminelles ou pénales. Il impose des peines ayant des conséquences pécuniaires ou privatives de liberté. Dans ce cas, c’est l’État qui poursuit l’intimé.
Un ingénieur peut faire l’objet d’une condamnation pour négligence criminelle si le procureur de la couronne réussit à convaincre la Cour que la conduite de l’ingénieur était déraisonnable, insouciante ou téméraire au point d’être criminelle. RessourcesLIENS ET RÉFÉRENCES DE L'ORDRE
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Avertissement : Le Guide de pratique professionnelle constitue un outil de référence et d’accompagnement des ingénieurs au Québec. Il est une source d’information générale et ne constitue aucunement une opinion, un avis ou conseil juridique. Son contenu ne doit pas être interprété pour tenter de répondre à une situation juridique particulière.